Arnaud Carton de Grammont, époque 2. Le chef qui s’était installé dans le Vaucluse est revenu, à la rentrée, chauffer casseroles et poêles dans ce restaurant mythique fondé à l’aube des années 2000. Bien lui en a pris car il nous manquait, son style et sa liberté rares en font un inclassable du paysage. Dans sa micro cuisine d’à peine 9 m2, on le voit virevoltant sur lui même, saupoudrant ici, tendant les bras là, s’agenouillant devant le four, dans une chorégraphie dont les pas n’appartiennent qu’à lui.
Les couteaux gratinés au beurre d’algues-crème de courge butternut s’accompagnent de falafels croustillants ; le carré d’agneau est présenté avec des pois chiches dans un bouillon de ras el-hanout-courgettes et blettes sauvages grillées-tomates confites. Il est fier le chef, il montre les photos de ses lourds paniers lorsqu’il revient en métro du marché paysan du cours Julien. Il est fier de cette carte méditerranéenne très inspirée et élégante, il est heureux de montrer ses pâtes achetées à Turin, en Italie : « J’y vais en voiture et je la remplis de pâtes. Je ne cuisine que ça et quand j’en n’ai plus, je repars en chercher à Turin » dit-il tout sourire. Faut reconnaître que la pasta de la Maison Pastificio Defelippis, c’est quelque chose ! La sauce tomate s’y accroche, les jus concentrés et épais dans lesquels les palourdes ont distillé leur saveurs, sont intenses et concentrés. Une pointe de thym frais, moins puissant que les herbes ramassées au plus fort de leur concentration en été, nous ramène à l’identité marseillaise du patron. Il est rassurant Carton de Grammont et son chou craquelin, cuisiné l’après-midi même, démontre sa maîtrise. Un peu de glace verveine, une sauce chocolat à 55% et voilà une version de la profiterole tellement plus funky que la déjà-vue vanille-chocolat noir à 71%. Alors faut-il y aller ? Oui si vous aimez les cuisiniers qui travaillent à l’oeil, à coup d’intuition, parsemant leurs recettes d’une once d’expérience et d’un zeste de savoir-faire. Oui si vous aimez les cuisines jamais millimétrées et très ajustées. Oui, enfin, parce que le Café des Epices by ACDG n’a pas pris une ride au fil des années. Il est aussi dingue qu’en 2002, et ça c’est bien.
Le Café des Epices, 4, rue du Lacydon, Marseille 2e arr. ; réservations au 04 91 91 22 69.
Menu : 39 €. A partager à l’apéro : 10 € ; entrée : 12 € ; plat : 24 € ; pâtes du jour : 17 € ; dessert : 9 €.