Pierre Chatelain s’est fait connaître, il y a quelques années, avec son premier restaurant, joliment baptisé l’Alcôve. Parce qu’il nourrit un sens inné de l’élégance, son nouvel estaminet, inauguré en janvier dernier, a été baptisé Grenache. Rien que de très normal pour cet ancien élève de l’école hôtelière de Bonneveine, à Marseille, qui cultive également un goût très sûr pour les jolies bouteilles. Idéalement situé dans le centre d’Aix, entre les Prêcheurs et les Arts et Métiers, le Grenache possède une très belle terrasse dont on jugera des atouts cet été, à l’ombre du platane. Pour l’heure, la salle réserve de belles surprises, aménagée elle aussi avec un sens de l’esthétique qui le dispute au pratique. Parce qu’il souhaite nous faire vivre les joies d’un « restaurant de partage », Chatelain propose de déboucher des vins renommés à prix caviste à l’instar de ce Trévallon rouge 2014 à 69 euros ; les connaisseurs apprécieront.
A l’heure de l’apéro, un verre de château Vignelaure cuvée le Page blanc, autre régional bio de l’étape, donne à apprécier de sa fraîcheur et de son caractère fruité. La carte invite au voyage, des pays du Levant, homos à la crème de tahine-grenade et pain nan, à la Suède, avec un saumon gravlax-blinis et crème de wasabi, sans jamais oublier les provinces françaises (oeuf bio parfait-velouté de carottes-maïs grillé, volaille-crème de chorizo-tombée de chou vert)…
En cuisine, Laura donne la pleine mesure de sa maîtrise : cette Bourguignonne rompue à la cuisine de haute volée apprise, entre autres, chez Mathias Dandine, fait monter la pression. Les lentilles corail-feta-concombre-olives et yuzu sont très justement assaisonnées. A l’égal du gravlax servi à juste température charnu et délicat, la qualité des produits est évidente, les équilibres respectés. Au même moment, la bande son distille Polo et Pan dont la fameuse Canopée a enchanté l’été dernier. Les ravioles de tourteaux-bouillon de citronnelle font monter la pression : le travail est minutieux, les assiettes raffinées s’inspirent de l’Asie. Les saint-jacques juste saisies affichent une mine dorée éblouissante, nimbée des arômes de pastis surligné de fenouil taillé en brunoise croquante. Escapade en Afrique du Nord, évocation des époques ou l’agneau était servi en effilochée roulée en pâte à filo, le croustillant d’agneau aux fruits secs résonne sur une purée de patates douces. Alors faut-il y aller ? Oui car Pierre Chatelain a gagné en maturité et son Grenache n’a guère eu à attendre pour convaincre. Oui pour le service serein, le risotto de petit épeautre à la truffe noire, l’ambiance cool et le Snickers pour cahuètes addicts. Oui enfin pour le rarissime affogato, preuve que ce gars-là sort des sentiers battus avec à propos.
Le Grenache, 2, place Joachim Gasquet, 13100 Aix-en-Provence ; résas au 09 80 82 85 92. Carte environ 30 euros.
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