Samedi 19 novembre, 14h45, une longue queue s’étire devant le hall 3 du parc Chanot, quelque 300 personnes ont entamé un défilé en serpentin à un rythme soutenu : les temps d’attente sont relativement courts, le salon dévorant autant de public qu’il n’en libère. « Je n’en reviens pas, on retrouve les taux de fréquentation de 2019 et je me demande si, à ce rythme, on ne va pas faire mieux » souffle Philippe Colonna, l’organisateur du 34e Savim d’automne, sans conteste le plus grand salon gastronomique de France, mettant en lien direct producteurs et consommateurs.
Cet hiver, la crise énergétique, les pénuries diverses et l’inflation auront-ils raison de la présence de quelques produits star au menu de nos fêtes de fin d’année ? Le foie gras est un emblème : la filière, frappée par les abattages massifs de canards par crainte d’un retour de la grippe aviaire, a averti d’un risque, sinon de pénurie, du moins d’une envolée des prix. Alors comment réagissent les producteurs et par quels moyens comptent-ils nous approvisionner en foie gras ?
L’exemple de la ferme Descoubet
Les Descoubet travaillent la terre de cette ferme du Gers « depuis Louis Philippe. Ça a fait 5 générations et mon fils Pierre sera la sixième » lance Stéphane avec fierté. Cette exploitation familiale produit du foie gras du Gers et se souvient avec amertume de ce mois de décembre 2021 où 1 000 canards ont été abattus « pour assainissement de zone ». Cette année, Stéphane Descoubet peut souffler, il n’y a eu aucun abattage dans le Sud-Ouest, « en revanche, c’est la Vendée qui est touchée ». La Ferme Descoubet travaille 6 000 canards en année normale ; on y abat 250 canards tous les 15 jours durant 6 mois, avant de passer à un rythme de 400 canards par semaine, durant les autres 6 mois de l’année.
« On vient au Savim depuis 10 ans au moins, annonce Stéphane Descoubet. J’ai longtemps travaillé pour la grande distribution mais on ne s’en sortait pas et un jour, ma femme a aligné les chiffres et a trouvé le moyen de vivre de notre travail : il fallait passer à la vente directe. Vous savez, nous dans le Gers, on est loin de tout, alors le Savim c’était le moyen idéal pour nous d’aller à la rencontre des clients ». Une démarche qui s’est vite avérée payante : – Les Marseillais adorent la bonne bouffe et il sont plus souriants et heureux que les Parisiens avec qui on n’a jamais eu de bonnes accroches » poursuit Stéphane Desoubet. Chaque édition du Savim est un investissement payant dans le temps puisque « les jeunes qui viennent nous voir aujourd’hui sont ceux qui venaient avec leurs parents, il y a 10 ans », analyse le paysan.
Sur son étal, du foie gras mi-cuit et des produits déja tous vendus : – En trois heures, vendredi, on a écoulé 60 foies frais ». Stéphane est venu à Marseille avec son fils, Pierre et Mando, un copain. Dans leur camionnette, 5 000 € de marchandise et une certitude : – On va tout passer ». La ferme Descoubet, comme les autres, a dû encaisser les augmentations de prix du gaz, du gazole, de l’électricité « et des cannetons que nous achetons pour les faire grandir ». Même si les céréales destinées à l’alimentation sont produites à la ferme, elles s’avèrent plus onéreuses cette année mais Stéphane a édécidé de reporter « raisonnablement » ces hausses tarifaires. « Sur les pots, ça représente 1 € de plus ; je n’ai pas voulu profiter de la situation pour augmenter à outrance les prix ». Ainsi du foie déveiné à 55 € le kilo qui figure parmi les plus compétitifs alors que beaucoup l’annoncent à 60 voire 70 €.
A l’instar de beaucoup d’autres producteurs participants au Savim, Stéphane Descoubet tente d’enrayer la spirale inflationniste ; une raison supplémentaire pour le faire travailler et contribuer à préserver nos si fragiles filières françaises.
34e Savim d’automne 2022, Hall3 parc Chanot du vendredi 18 au lundi 21 novembre 2022. De 10h à 20h (fermeture à 18h le lundi). Parking 2 000 places, 6 € la journée.
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