Ne vous y trompez pas, derrière l’apparente simplicité des lieux, se cache un chef redoutable, injustement méconnu des Marseillais. Sébastien Vion signe, dans ce repaire pour initiés (catégorie à laquelle vous appartenez), une carte aux relents de haute gastronomie : rien que de très normal pour un cuisinier modeste qui ne court pas les plateaux télé et qui s’est formé chez Jean-Michel Lorain (La Côte Saint-Jacques) et Serge Gouloumès (le Mas Candille). Son foie gras, par exemple, est travaillé comme un opéra en fine gelée et abricots moelleux-mousseline de betterave au vinaigre de figues, le finger croustillant de tourteau et citron confit-taboulé de quinoa rivalise d’intérêt avec les gros oeufs de ferme en coque de pomme de terre dorée champignons-lard paysan et mouillette de pain aux céréales. Vion aime les mariages terre-mer, témoin la coquille saint-jacques risotto de petit épeautre éclats de foie gras et jus mousseux de poulet rôti. Côté desserts, les fraises (avec boule de chocolat blanc) ou le citron de Menton sur un biscuit zestes et menthe suprême au citron granité de limoncello prennent une belle dimension estivale rafraîchissante.
Ce mardi midi, la dodine de volaille farcie est fondante, souple et généreuse. Accompagnée d’un risotto d’épeautre aux asperges, l’assiette du jour est un exemple de juxtaposition des goûts et de travail des sucs. On racle sévère la cocotte en cuisine pour récupérer les sucs ! Idem de la côte de cochon présentée avec un petit pot de jus déglacé aux anchois, une merveille de fondant-croustillant très gourmande. La petite tarte fine de pommes de terre cuites à coeur qui l’accompagne témoigne d’un soin devenu rare à Marseille. Il n’y a aucun faux pas, Sylvie et Fabienne, les maîtresses du lieu, le savent bien ; on les sent en totale confiance avec leur chef. Ces dernières vont et viennent avec le sourire de celles qui savent la force tranquille qui conduit le piano. Alors qu’on se laisse aller sur la « fraîcheur de fraises » vient cette question : pourquoi le chef est-il si discret ? Il mériterait plus d’exposition ! Courez chez ces deux « Dames » qui seront heureuses d’avoir eu raison avant tout le monde, d’avoir cru en un cuisinier qui ne déçoit pas.
Le Bistrot des Dames, 34, place aux Huiles, Marseille 1er ; 06 50 07 35 13. Plat du jour environ 16 € ; desserts 9 €. Carte environ 50 €. Ouvert 7/7j.
Ajoute un commentaire