Les Arcenaulx en ont vu d’autres et ce n’est pas une pandémie planétaire qui aura raison de Jeanne et Simone Laffitte. S’en remettant à leur fidèle chef Eric Cornilleau, les deux soeurs, relèvent le défi de l’emporté avec beaucoup d’a propos. Le vendredi c’est aïoli, une évidence en Provence. Un plat qui compte les siècles et qui n’a jamais été aussi contemporain. L’aïoli parvient à l’exploit de fédérer toutes les tribus, les gourous de la cuisine végétarienne version vapeur, aux gourmets pour qui seul le goût compte en passant par les adeptes du sans gluten.
La carte à emporter des Arcenaulx est très « rassurante » et empile les valeurs sûres dès l’apéritif : des moules de tamaris à l’escabèche, une salade de poulpe, un tarama maison, un chèvre fermier 100% marseillais. Les artichauts frais barigoule et petits lardons se laissent manger en un défilé ininterrompu de gourmandise. Les plats, de la soupe de poissons de roche aux pieds paquets, des petits farcis à la terrine de foie gras, défilent sur table comme un festin rabelaisien.
L’aïoli est irréprochable, rien ne manque à l’appel : chou fleur, pommes de terre, carottes, haricots verts, artichauts navets, pois chiches et la fameuse morue dessalée sur laquelle perlent de micro-goutelettes d’huile d’olive. En remplacement des escargots, très présents dans l’arrière-pays, les riverains des côtes préfèrent les bulots-murex qu’on va chercher à la pique recroquevillés tout au fond de leur tortillon. Les cuissons et quantités font naître les sourires de contentement. Les artichauts barigoule aux petits lardons baignent dans un petit jus de cuisson qui imbibe la fleur.
Chaque bouchée en appelle une autre et nous conduit gentiment mais sûrement au dessert, un fondant chocolat noir et gingembre. Eric Cornilleau a imaginé un gâteau pour les adultes, très intense, très peu sucré, d’un noir aussi profond que la texture est épaisse, fondante et massive. Le gingembre apporte un coup de fouet gustatif et une nervosité que seul un café noir, type Bialetti ou un expresso ristretto parviendra à calmer.
Alors faut-il commander son repas aux Arcenaulx ? Eric Cornilleau a réfléchi ses menus pour que le transfert du restaurant à la maison se déroule à la perfection. L’esprit bourgeois de la vieille maison demeure intact. Quelques tartines de rillettes de sardines aux câpres, bien froides, à l’apéritif, sur un ballon de vin blanc sec et iodé nous conduisent sur les sentiers qu’ombragent quelques pins. La seule chose que Jeanne et Simone ne nous aient proposé, ce sont les cigales et ça, on ne peut pas le leur reprocher.
Les Arcenaulx, 25, cours Honoré d’Estienne d’Orves, Marseille 1er. Aïoli 12 €, gâteau 5 €. Plats du jour 12 €.
Commandes en ligne sur le site de la librairie-restaurant. et par téléphone au 04 91 59 80 30. Retraits de 11h à 14h et de 17h à 19h.
Un grand merci pour ce très bel article qui met en valeur la cuisine de notre chef Eric Cornilleau.
Quelle jolie plume, un vrai voyage, comme si l’on y était, bravo !!