La deuxième édition du festival les Chefs à Saint-Tropez fêtent les Producteurs s’est achevée dimanche soir, 8 mai, après 3 jours de fêtes et de prise de conscience. « Arnaud Donckele m’avait prévenue, il m’avait dit que dans un festival, le plus dur, c’était de réussir le deuxième rendez-vous. Ce soir, je crois que c’est une réussite », confiait dimanche sur la place des Lices, l’organisatrice Pascale Perez. Porté par des chefs de renom, Arnaud Donckele (Cheval Blanc, 3 étoiles), Eric Canino (2 étoiles, la Réserve), Nicola Canuti (le Byblos), Stéphane Avelin (le Caprice des Deux), Alexandre Fabris (1 étoile, château Valmer) et tant d’autres, ce festival les Chefs à Saint-Tropez fêtent les Producteurs a pour vocation de promouvoir l’agriculture et l’élevage local.
Parole aux paysans
Au détour d’un stand, le paysan star du Var, Bruno Cayron expliquait pourquoi il avait tenu à être de la fête : – La situation est catastrophique pour le monde paysan. Il y a beaucoup d’abandons car c’est un métier très dur ; moi, j’ai tout donné pendant des années avant de pouvoir sortir la tête hors de l’eau. Je m’inquiète de tous ces départs à la retraite non remplacés et j’ai peur qu’il n’y ait plus de paysans en Provence et en France ». Un constat que partage Sydney, installé dans la plaine de Grimaud depuis 2019 : « Notre problème, c’est le manque de terres dans notre région… C’est pas facile d’être paysan en France aujourd’hui ».
Dans ce contexte, le festival tropézien prend tout son relief : – Si ce week-end peut rapprocher les gens, alors c’est bien de le faire, estime Sydney. Je profite de ma présence ici pour accueillir des enfants des écoles comme ceux de l’école Sainte-Anne de Saint-Tropez. Ils découvrent les produits, je leur ouvre les yeux, je leur montre comment on travaille, comment ça marche. Ensuite, je leur fais planter des graines dans une boîte à œufs, c’est sain, ça pousse et c’est génial pour les gosses ! »
« Remercions tous ceux sans qui on ne serait rien car la mise en place d’un plat se fait d’abord en terre. Cette manifestation leur rend hommage, humblement »
Arnaud Donckele, soutien du Festival les Chefs à Saint-Tropez fêtent les Producteurs
Vendredi 6 et samedi 7 mai, au milieu d’un marché de quelque 75 producteurs (ils étaient 30 en 2021), une vaste cuisine en plein air a vu s’affronter le Gotha de la cuisine locale et nationale avec, en point d’orgue, la démo de la tarte aux framboises, par Cyril Lignac lui-même, samedi après-midi. « La mise en avant des produits et des producteurs, c’est une évidence quand on exerce dans les métiers de l’hôtellerie et de la restauration ! C’est normal de travailler avec les hommes et les femmes de nos régions, c’est la base, c’est une évidence, a confié le chef de M6 au Grand Pastis. Il y a des hommes derrière chaque terroir et il faut les respecter… »
Laurent Tarridec aussi
Saint-Tropez est resté conforme a sa réputation, attirant pour l’occasion Stéphanie Lequellec, Eric Fréchon, Mathieu Vianney et Laurent Tarridec. Ce dernier qui, à l’instar d’un Gui Gedda ou d’un Jacques Maximin, est un monument de la cuisine française, était tout heureux de retrouver ses pairs et de se joindre à la cause. « Il faut respecter les saisons et arrêter d’acheter les asperges en Espagne, s’est ému Eric Canino. Ce sont le marché du jour et les produits qui décident de nos menus et pas l’inverse. On nous dit que le local et le bio c’est cher mais c’est un faux débat. Il faut d’abord réduire les quantités et acheter du bon car la santé n’a pas de prix. Avec ma femme, on ne fait pas de grosses courses, on s’achète quelques légumes, une viande et voilà mais je pense qu’il y a eu quand même un effet Covid et les gens, peu à peu, retrouvent le chemin des marchés ».
Vincent Maillard, chef du très trendy Lily of the Valley à la Croix Valmer ne dit rien d’autre : – Moi ça fait 12 ans que je vis et travaille à Saint-Tropez et j’ai rencontré plein de producteurs épatants par hasard, ce n’est pas normal. Ils doivent être connus, avoir pignon sur rue ! Les chefs de leur côté doivent faire des efforts et changer leur façon de travailler en acceptant les contraintes de la petite production ». A mots couverts, certains chefs reprochent à quelques de leurs collègues d’utiliser les producteurs à leur bénéfice : « Ils mettent le nom d’un éleveur ou d’un pêcheur à leur carte mais le font très peu, trop peu travailler. Il ne faut pas être dupe et encore moins tromper le client. Quand on met le nom d’un gars à sa carte, on le fait bosser ».
Comme toujours dans le golfe, les soirées magiques sur le rooftop de l’hôtel de Paris en bord de piscine, le grand banquet des producteurs sur la place des Lices dimanche et le déjeuner de solidarité servi à la Petite Plage ont fait le plein. Ce dernier repas a réuni 127 inscrits qui ont tous payé un ticket de 120 € par personne ; tous les bénéfices de ce déjeuner ont été reversés à l’association Solidarité paysans. A la manœuvre, il y avait, encore, Arnaud Donckele, Eric Fréchon, Cyril Lignac et Gérald Passédat. La prise de conscience est là, les démarches vertueuses se mettent en place.
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