158 ans au compteur, cinq générations et bientôt six… L’histoire de cette famille se confond avec celle des fruits confits. D’aussi loin que Nostradamus le raconte, on cuisine des fruits confits sur ce petit territoire entre Salon et Saint-Rémy-de-Provence, sur les contreforts des Alpilles. Aux origines, il s’agissait surtout de conserver des fruits une fois leur saison passée pour les déguster quelques mois plus tard. Dans la décennie 1960, la quasi totalité des confiseurs de Provence a cédé aux sirènes de l’industrie, transformant les structures familiales pour tenir tête à la concurrence internationale et conserver, voire gagner des parts de marché. Mais chez les Lilamand, on n’a rien changé, conservant les habitudes et gestes d’autrefois.
Certains fruits à la peau épaisse et trop dure, sont pelés (melon, poires, ananas). Ils sont ensuite plongés dans de l’eau plus ou moins bouillante, plus ou moins longtemps pour éliminer les microbes et favoriser la pénétration du sucre dans la chair.
Le confisage réside dans la succession de 6 à 7 bouillons successifs dans des sirops de plus en plus sucrés afin d’éliminer l’eau du fruit et la remplacer par le sirop. Cette opération dure de 3 semaines à un mois. Ensuite, le fruit confit se repose au fruitier, dans un bain de sucre durant 2 mois.
Les fruits sont égouttés au dernier moment pour conserver leur moelleux.
Le glaçage permet de saisir enfin le fruit sans s’en mettre plein les doigts.
Lendemains incertains pour les fruits confits
Les confiseurs ont-ils un avenir ? Pierre Lilamand ne cache pas son inquiétude : « J’ai peur qu’il y ait une fin programmée du métier. La transmission est délicate car il n’y a pas de recettes, rien n’est figé et nous travaillons dans un empirisme permanent. Le danger pointe à chaque étape, de l’achat des fruits au confisage, les tours de main, les cuissons, si une étape rate, tout est perdu ». Les nouvelles phobies alimentaires, contre le sucre notamment, suscitent l’inquiétude : « Le grand danger est chez les industriels qui mettent du sucre partout, jusqu’aux plats cuisinés supposés être salés, c’est ça qu’il faut condamner !, s’agace Pierre. Nous, nous fabriquons un produit exceptionnel que l’on savoure, il ne faut pas se gaver »…
Lorsqu’il a pris la succession de son papa, Pierre Lilamand s’était donné 5 ans pour apporter sa pierre « et en 3 ans, j’en avais fait beaucoup plus que je ne l’avais pensé » dit-il. « Lorsque j’ai dit que je voulais poursuivre, mon père m’a dit : – Ne fais pas ça’ mais ça sonnait faux dans sa voix ». Pierre Lilamand s’est attaché à faciliter le métier en achetant des chariots de manutention, « parce qu’avant, on portait les bassines une à une à la main » mais sur le confisage, pratiquement rien n’a changé au fil des siècles. Quant à ses enfants Romain et Lola, respectivement 17 ans et 23 ans, Pierre Lilamand ne veut « sourtout pas les forcer à quoi que ce soit. Je ne voudrais pas susciter chez eux un rejet »… Comme le fit jadis son père.
5, ave Albert-Schweitzer et 20, rue de la Commun, 13210 Saint-Rémy de Provence ; 04 90 92 11 08
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