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Lacamp, ce si discret torréfacteur marseillais bientôt centenaire

Torréfaction Lacamp à Marseille 5e arrondissement
Quelque part dans le 5e arr., une adresse confidentielle, un patrimoine sublime

En 2027, les cafés Lacamp fêteront leur siècle d’existence. Une marque séculaire, un savoir-faire exceptionnel et un patrimoine immense pour Marseille qui a compté, au XXe siècle, plusieurs dizaines d’artisans torréfacteurs. Si les Luciani ou la famille Blanc comptent parmi les plus connus, la famille Frédière, propriétaire de la marque, cultive, elle, un rare sens de la discrétion. « Mon grand-père était torréfacteur lyonnais et s’est installé à Marseille en 1927, dans ces mêmes locaux, relate Jean-Jacques Frédière, 57 ans. Il s’est lancé dans la torréfaction de café et a donné son nom de famille à la marque. Nous avons toujours travaillé en famille avec un ou deux employés tout au plus ».

cafés Lacamp à Marseille

A l’orée des années 1970, Alain et Georgette, le fils et la belle-fille du fondateur, rachètent la boutique Couteron au 195, rue Paradis (6e arr.) qui devient vite une institution. Dans le même temps, le couple rachète la marque Lacamp, alors installée au 248 du boulevard Chave, et qui sera expropriée au moment de la construction de la rocade Sakakini. Aujourd’hui, la marque demeure, Lacamp vend sa production à des professionnels et travaille à façon pour d’autres torréfacteurs : – Ils achètent le café vert et je torréfie… Je fais du sur-mesure sur des petites productions pour de grands noms », explique Jean-Jacques, toujours secret.

« Il y a des gens qui disent que le robusta n’est pas bon. Ça vient en fait de la torréfaction ; bien cuit, on peut se casser le nez sur un robusta, tout dépend aussi des origines »

Jean-Jacques Frédière

Lacamp c’est le café au goût marseillais

Les mains dans un sac de café, Rémy, fils de Jean-Jacques assure que c’est son père qui lui a tout appris comme ce dernier à tout appris du grand-père et de l’arrière grand-père. « Je réfléchis à prendre la suite », hésite le jeune artisan de 26 ans, titulaire d’un BTS alternance cuisine qui a bossé pour Reine Sammut, au domaine de Murtoli en Corse et vécu 2 ans, à Montréal au Canada. « A Marseille, il y a des Nespresso addicts qui demandent des choses qui n’existent pas dans le monde du café », s’amuse Rémy, incollable sur la torréfaction traditionnelle « d’une vingtaine de minutes à 180-210°C pour ne pas agresser les grains ». Revenant sur le goût Marseillais, Rémy estime qu’il est proche de celui qui prévaut tout autour du bassin méditerranéen : – A Marseille, on aime un café fort, à Noailles par exemple, il y a des enseignes qui ne servent que du 100% robusta ».

Les vieilles machines de torréfaction du début du siècle encore en état de marche

Idées reçues et discours marketing

« Pour faire un bon café, il faut mélanger les origines car les qualités et défauts se lissent et apportent de la complexité » estime Rémy. « Le café, c’est une question d’éducation, nous avons beaucoup de clients qui avaient l’habitude du café de grandes surfaces qui ont découvert nos cafés torréfiés à l’ancienne et ne peuvent plus rien boire d’autre », complète Jean-Jacques Frédière.

arabica et robusta
Arabica, main gauche, robusta, main droite, deux frères complémentaires

« Le marketing invente trop de choses sur le café, méfiez-vous du green washing »

Rémy Frédière

« C’est bizarre d’entendre des gens dire d’un café qu’il a un goût d’abricot, de framboise, de ci ou de ça, moi ça me laisse perplexe, estime Jean-Jacques Frédière. Peut-être décèlerez-vous des notes de cacao ou de noisette mais un café reste un café ». Une nouvelle génération se gargarise autour des cafés de spécialité mais il y a une part de greenwashing dans cette mode qui commence à montrer ses limites. « La tendance du moment consiste à dénigrer le travail des torréfacteurs traditionnels mais nous, on a toujours travaillé des cafés fins, on a toujours proposé du sidamo, du Nouvelle Guinée, du maragogype. Nous ne  dirons rien sur les cafés de spécialité que nous estimons trop chers pour le consommateur », estiment en chœur le père et le fils.

Chez les Frédière, pas d’ordinateur ni de courbes de chaleur, on travaille à l’oeil, à la chaleur, à l’émotion et aux grains qui craquent et chantent. « On peut se manquer de temps en temps  mais vous pouvez nous faire confiance, personnellement, je torréfie depuis que j’ai 14 ans », glisse l’œil malicieux Jean-Jacques. Au-delà des modes, il y a la connaissance d’un milieu, ses pratiques et usages, ça s’appelle la tradition et le savoir-faire. A Marseille, ils ont un goût, fièrement défendu par cette famille depuis bientôt un siècle.

Pour acheter du café Lacamp, toujours téléphoner au préalable au 06 01 14 25 92. Ensachement à la commande exclusivement.

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