
Au fil des ans, c’était devenu une habitude. A chaque fois que Nico avait besoin d’un coup de main pour assurer le service, il avait l’habitude d’appeler Bruno. Les deux amis dans la vie se donnaient la main pour s’entraider jusqu’au jour où Nico a définitivement voulu tourner la page et a cédé son restaurant à Bruno. Dans le quartier de Montredon, une ruelle pleine de sens interdits atterrit ici, au bord de l’eau. D’un côté de la rue, il y a la maison, sans style particulier. De l’autre, il y a une plagette avec cette terrasse couverte et abritée des embruns, comme posée sur des pilotis. C’est dans ce décor tout de guingois que s’est construit ce qui demeure comme l’un des plus beaux emplacements de la ville.
L’histoire est marseillaise ; ici, pas besoin de servir 5 rondelles de panisse à 9 € pour « faire marseillais ». La soupe de poissons de roche d’Eric le pêcheur, il se reconnaîtra, suffit à votre bonheur. Epaisse, calcaire et marine, on la sert dans une soupière brûlante ; elle nappera ensuite quelques tranches fines de pain grillé aux herbes, tartinées de rouille et parsemées d’emmental. Chaque cuillerée est épaisse, avec du grain comme il se doit. Toujours à la carte, l’escalope milanaise, le gratin de cabillaud, un loup d’élevage bio ou les calamars sautés ail-persil et salade verte ont conservé l’accent de leurs origines.

Linguine alla vongole ou pizza ? Ce sera une royale que Bruno agrémente d’olives taggiasche et de saucisse italienne en lieu et place du jambon cuit, saucisse revendiquée de la boucherie Lucas Morand à Endoume. Pâte uniformément cuite, sauce tomates fraîche, Bruno sait faire et l’a déjà prouvé par le passé. C’est Frankie qui est au service, un vrai pro qui a longtemps servi chez Paul à quelques virages de là. Le type est fantastique, souriant, aimable et serviable, ses réflexions teintées d’humour font mouche et nous confirment qu’ici, rien ne change.

Baba au rhum, pana cotta, tiramisu, profiteroles, feuillantine aux pommes. Tous les grands classiques du dessert populaire sont passés en revue mais c’est la mousse chocolat préparée le matin même qui vous fera vaciller. A l’heure du café, Bruno vient s’asseoir parce que ça faisait longtemps qu’on n’avait pas refait le monde . « Tu sais, je voudrais faire un peu comme chez Hortense au Cap Ferret… Tu connais Hortense hein ? Eh bien, je voudrais servir tous les plats avec des frites fraîches, servir des moules marinières au vin blanc, sans crème mais avec de la saucisse italienne »… glisse-t-il.
Alors peut-on encore aller manger Au bord de l’eau ? Oui parce que le passage de relais entre Nico et Bruno s’est fait en douceur, parce que le second aime autant ses clients que les aimait le premier, parce que Bruno a tout plein de projets pour cette adresse qui fait naître, en nous, une incroyable tendresse.
Au Bord de l’Eau, 15, rue des Arapèdes, Marseille 8e arr. ; infos au 04 91 72 68 04. De 30 à 50 €.
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