L’extraordinaire effervescence qui agite Marseille se matérialise, cette semaine encore, avec une nouvelle table tombée dans l’escarcelle de la ville. C’est une irrépressible envie de soleil qui a conduit Eugénie jusqu’ici, sur le square Edmond-Rostand où elle a aménagé sa jolie terrasse. Native de Lille, Eugénie a grandi à Aix, a fait ses études à Toulouse, des stages en Chine et même travaillé à Bruxelles : « J’ai beaucoup appris en Belgique dans un très bon bar à vins » avoue-t-elle. Pour « les Trois Coups », Eugénie a composé une carte de vins nature dans l’esprit de ce qu’elle a découvert à la Maison Buon, rue Grignan, dont elle s’est aussi occupée de la cave.
De la salle à la terrasse, Daphné présente une ardoise riche de 2 entrées, 3 plats et 3 desserts. Le soir est dévolu aux formules copines, à partager entre potes avec une bouteille de vin en guise d’apéritif (la Pierre de Sisyphe, blanc 2017, un vin de l’Hérault du domaine Jefferies Bories). Soupe de poireaux sauvages-noisettes torréfiées et herbes, quasi de veau-légumes poêlés et jus corsé, maigre à la plancha-mousseline de céleri rave-beurre de nage romarin et tiramisu de ta grand-mère font naître les sourires. Les propositions sont rassurantes et heureuses, les assiettes racontent les vacances à la campagne ou en bord de mer et les genoux écorchés des chutes en vélo.
En moins de 3 semaines, les habitués ont déjà pris leurs aises. Giovanni Graziani, en cuisine, y est pour beaucoup. Le chef, bientôt 38 ans, un ex-Robuchon qui fit les belles heures durant 4 ans d’un restaurant rue Ramey (Paris XVIIIe), revendique « une cuisine bistronomique de grand-mère ». Et ajoute avec son délicieux accent : – Ce sont les anciens qui m’ont tout appris ». Giovanni signe des assiettes très en phase avec l’esprit marseillais comme le mesclun-oeuf parfait et ventrèche ibaiama où se sont cachées quelques olives taggiasche. Les assaisonnements résonnent juste, la salade d’une éclatante fraîcheur invoque les mânes du printemps. Suivent les paccheri à la Genovese du nom du cuisinier napolitain à qui l’on doit cette recette de boeuf efficloché (de la macreuse) cuisson longue dans un fond de boeuf aux oignons. Daphné fait goûter une cuvée des « Beaux plaisirs » de Bastien Boutareaud, voisin depuis un an d’Henri Milan à Saint-Rémy-de-Provence. Un vin à l’attaque franche de fruits rouges (framboises), un vin droit à la structure discrète, à déguster frais, comme un bonbon anglais…
Alors faut-il y aller ? Oui bien sûr car le riz au lait caramel laitier-éclats de noisettes torréfiées suffira à convaincre les plus difficiles. Oui pour la gentillesse d’Eugénie qui semble avoir trouvé ici le plus beau terrain pour exprimer sa passion ; oui pour la simplicité des assiettes qui doit tout à la sélection des produits et à leur juste traitement. Suivez de (très) près Les Trois Coups, les mois prochains nous donneront raison.
Les Trois Coups, 44, rue Saint-Suffren, Marseille, 6e arr. Infos au 09 81 08 83 84. Déjeuner, 28 € ; soir, planches de 12 à 15 €, environ 25 €.
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