Anthony Germani est un cuisinier de l’évidence. Il s’efface devant son produit, lui donnant toute l’attitude pour s’exprimer, le flattant, le cajolant, l’encourageant à donner le meilleur. Anthony Germani a 35 ans ; c’est un pur produit de l’école hôtelière de Bonneveine où il a appris à travailler avec bon sens. Dans le quartier de la Joliette, zone à hauts risques pour l’amateur de belles assiettes, on est habitué à raisonner en montant de ticket restaurant. Germani vaut bien mieux que ça, voilà pourquoi vous devriez pousser la porte de son bouclard. L’accueil y est gentil, le service tout autant. La carte change à un rythme effréné, faisant trébucher les meilleurs sprinters.
D’une semaine à l’autre, les suggestions voltigent. En ce moment, les pointes d’asperges de Martine Tardieu accompagnent des oeufs façon mimosa-vinaigrette de Xérès. Pas original ? Certes mais il faut du talent pour susciter de l’émotion avec un oeuf mimosa ! Premières chaleurs, première fraîcheur avec ce ceviche de rougets grondins fumés aux épices-écume jus de têtes et gelée de bouillon. Le fumé soutient les saveurs iodées, les chairs puissantes participent de la longueur en bouche portée par la puissance des épices : le chef sait travailler. Le dos de merlu est parfaitement cuit, sa chair se détache en fins pétales nacrés et s’habille d’un jus épais de roquette que viennent taquiner des petits pois sucrés. Une tranche de betterave cuite à la peau croustille et emporte l’adhésion de la table entière. Plus que rarissime à la carte de nos restaurants, une première en 22 ans, la recette du veau Orloff est ici proposée en version boeuf fumé au foin. Jus de viande réduit sirupeux, cube de polenta, voilà un exemple de haute cuisine qu’il faut absolument porter aux nues. C’est moderne, brillant, la viande de boeuf encore saignante se prête idéalement à l’exercice.
Une tarte fine aux fraises de Bouc-Bel-Air fleurs de romarin et petit chou à la crème plus tard, on savoure un café d’origine bordelaise (eh oui), magnifique et voluptueux, issu d’un assemblage de trois crus dont un sidamo d’Ethiopie à défaillir. Alors faut-il aller à un Petit Cabanon ? Un chef qui a fait ses classes chez Gagnaire, Robuchon, Charial à Baumanière et Francis Robin à Salon inspire le respect. Germani est l’un de nos 5 plus beaux coups de coeur des 6 derniers mois. Grande cuisine française et intelligence créative conjuguées, promis-juré vous allez en raffoler.
Un petit cabanon, 63, ave Robert Schuman, Marseille 2e arr. Résas au 04 91 90 01 53. Formules déjeuner 17, 21, 22 et 26 euros. Dîner formules 26-28 euros.
Bravo, il mérite cette reconnaissance de notre meilleur chroniqueur gastronomique.
Précipitez vous, Un Petit Cabanon : « nothing else »