Une table, au Sud rouvre ce mercredi 9 juin prochain. C’est un nouveau chapitre qui s’écrit pour le chef et propriétaire du restaurant, Ludovic Turac, qui tourne la page Covid et embarque pour de nouvelles aventures. La salle d’abord. Elle a fait l’objet d’un relookage complet, le bleu profond du plafond et des tentures contrastant avec un mur d’or pailleté. Le parquet, à la façon d’un pont de bateau, conduisant tout naturellement aux tables nappées de blanc. L’ambiance évoque la mer, jamais bien loin des inspirations d’un Turac au meilleur de sa forme et qui a mis à profit ces longs mois de fermeture, pour repenser son offre. Le chef conserve son menu Marseille en 3, 4 ou 6 étapes et sa formule déjeuner ; en revanche, son menu dégustation, pensé comme un passeport pour les cuisines du monde, dévoile un chef renouvelé, créatif et doté d’une surprenante vitalité.
Le menu en 8 étapes raconte les villes qui ont marqué le cuisinier « avec des plats de là-bas réinterprétés ». S’en suit une succession impressionnante de surprises à chaque coin d’assiette. De son séjour à Bangkok en 2017, le chef exhume une crevette crue, servie avec trois sauces, coriandre, cacahuète et soja qui donne le la d’un repas qui va gagner en puissance d’une assiette à l’autre. Suit un étonnant hommage à Jérusalem avec un artichaut en pâte à tourte-homos escorté d’une salade de boulghour-pois chiches-zaatar, concombre et labné et falafels à l’huître. Une assiette, un bol… Les plats et goûts s’entrecroisent comme dans ce « trempage », une brandade de merlu et banane fraîche-melba de pain de mie en croûte d’herbes et bisque de favouilles au lait de coco. Il y a de l’audace, du courage dans ces plats que Turac a longuement pensés et qui témoignent d’un beau niveau. Il y a cette paella parfaite comme à Madrid et ces keftés imbibés de jus comme à Istanbul mais c’est assurément sur le voyage à Shangaï que naît la plus belle émotion, le point d’orgue d’un repas qu’il faut prendre très au sérieux. Une asperge (lactofermentée) condiment ananas sauce aigre-doux et un bao farci au crabe et piment escortent une queue de langouste braisée servie sur son barbecue directement à table.
Alors est-ce que c’est bon ? Allez-y sans inquiétude ; le repas sera parfait et plein de surprises, à l’image de cette coque au beurre de cacao et brisure de navette au cœur de mousse fleur d’oranger et condiment aux agrumes. Avec le café, une ganache choco-noisette (et crème glacée basilic, recouverte de tuiles chocolat blanc et noir), accompagne un tiramisu aux trois pointes de sirop de basilic et sirop de café. Turac truffe son repas de mignardises et de références qui donnent du relief à ces joyeuses assiettes. La recherche se retrouve aussi dans le travail du sommelier qui casse les codes et suggère des bières de Corse, du vin d’Arménie, un cocktail pimenté, du thé fumé, poussant loin les frontières d’un métier qui a grandement besoin de se renouveler. Alors faut-il y aller ? Oui car ça déborde d’enthousiasme, la technique s’efface derrière l’intention et oui encore pour le service débordant de gentillesse. Une table, au Sud reprend du service très fort, très haut.
Une Table, au Sud, 2 Quai du Port, Marseille 2e arr. ; 04 91 90 63 53. Formule déjeuner 39 € et menu Marseille 78, 95 et 120 €. Passeport dégustation, 160 €.
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